C’est quoi une Osmonde?

C’est quoi une Osmonde?

Pour se reproduire, l’osmonde royale, dont les feuilles ne sont pas dentées à l’inverse d’autres fougères, fabrique des frondes fertiles sur lesquelles se trouvent les sporanges. Documents remis – Michel Schuliar
Pour se reproduire, l’osmonde royale, dont les feuilles ne sont pas dentées à l’inverse d’autres fougères, fabrique des frondes fertiles sur lesquelles se trouvent les sporanges. Documents remis – Michel Schuliar

Pour se reproduire, l’osmonde royale, dont les feuilles ne sont pas dentées à l’inverse d’autres fougères, fabrique des frondes fertiles sur lesquelles se trouvent les sporanges. Documents remis – Michel Schuliar

En vous promenant dans les sous-bois des Vosges du Nord, vous pouvez croiser près de 40 sortes de fougères différentes. Mais il vous faudra être un peu plus attentif pour me trouver moi, l’osmonde royale, même si ma taille peut aller jusqu’à 1,50 mètre, parfois plus si je suis bien installée. Mes feuilles vert clair non dentées — on les appelle des frondes — sont une des caractéristiques qui me distinguent des autres fougères. Pour me trouver, il faut se balader, mais pas n’importe où, car je suis très exigeante quant à mon habitat : j’affectionne les milieux humides (huit mois humides dans l’année me paraissent un minimum), ouverts ou peu couverts. J’ai besoin de lumière, mais pas trop. Et j’aime les sols relativement pauvres comme les sols tourbeux et à acidité modérée. Dans le coin, on peut me croiser dans le site Natura 2000 autour de Wissembourg, autour de Lembach ou encore dans les forêts de Mitschdorf et de Preuschdorf.

Pour compliquer la tâche de ceux qui se lanceraient le défi de me débusquer, je ne suis pas visible tout le temps. Il faudra choisir la bonne période, car je ne pointe pas le bout de mes feuilles tout au long de l’année : je suis une plante vivace et reste au chaud en hiver. Lorsqu’il fait froid, mes feuilles sèchent et finissent par disparaître. Je renais chaque année avec les beaux jours, généralement en avril, grâce à un rhizome, une tige souterraine. Du coup, si on ne m’embête pas, je suis capable de vivre plusieurs années au même endroit — j’ai une durée de vie d’au moins cinquante ans si on ne perturbe pas mon habitat.

Ici, c’est à partir de juin que je commence à travailler pour assurer ma descendance, en fabriquant des sporanges : il s’agit d’une multitude de « petits sacs » dans lesquels se forment les spores, mon organe de dissémination. Je fais partie des plantes sans fleurs et sans graines. Je dois ma reproduction au vent : c’est lui qui transporte les spores et qui les répand. Lorsque ceux-ci retombent au sol, ils vont, s’il s’agit d’un milieu propice, germer et donner un mini-végétal qu’on appelle prothalle — là, il faudrait être vraiment attentif et avoir de très bons yeux pour le repérer, car il ne mesure que deux ou trois millimètres. Sur la face inférieure de ce prothalle vont se trouver des organes mâles et femelles. Un peu comme pour vous les humains, les mâles vont donner des anthérozoïdes (l’équivalent des spermatozoïdes) et les femelles des ovules. Pour que je me développe, il faut que les deux se rencontrent… ce qui est possible uniquement lorsqu’il y a de l’eau. L’anthérozoïde va alors féconder un ovule, ce qui crée une cellule œuf qui redonnera une fougère.

Une fougère comme moi, lorsqu’elle est adulte — c’est-à-dire lorsqu’elle a au moins cinq ans — peut fabriquer près de 100 000 sporanges contenant chacun des centaines de spores. Vous noterez que je mets toutes les chances de mon côté pour me reproduire. Mais si on me trouve très facilement sur la côte atlantique, je reste rare en Alsace du Nord, car mon habitat de prédilection n’y est pas simple à trouver — et il l’est d’autant moins lorsqu’on assèche les zones humides.

Bien plus fréquentes, les fougères mâles, femelles, dilatées ou encore la fougère aigle peuvent attirer les badauds en raison de leurs vertus. Les jeunes pousses de la gougère aigle, par exemple, peuvent être consommées, mais toujours cuites à l’eau — sinon c’est toxique — et servies avec une sauce. Quant à la fougère femelle, il fut un temps où elle était utilisée contre les rhumatismes — on remplissait les coussins de feuilles sèches. Mais attention : ne me confondez pas avec elle. Je ne supporterais pas d’être dérangée de la sorte.

De toute manière, depuis 1993, je suis protégée en Alsace et j’apparais sur la liste rouge (qui évalue les espèces menacées) au niveau mondial et européen : il est interdit de me détruire, de me couper (même si c’est pour me replanter dans votre jardin, où de toute façon je ne me plairais pas), de me mutiler, de m’arracher, de me cueillir, de m’enlever, de me colporter, de m’utiliser, de me vendre et de m’acheter. Tout ce que vous pouvez faire si vous me croisez, c’est m’observer.

Merci à Michel Schuliar pour ses connaissances en botanique et à Aurélie Picher, animatrice du site Natura 2000 à la Ville de Wissembourg.

Article DNA : Guillemette Jolain

27/08/2015 à 05:00

Osmunda regalis.

Osmondacées du groupe des ptéridophytes.

Facilement jusqu’à 1,50 m, quelquefois davantage selon les endroits.

Sexuée.

Au moins 50 ans si l’habitat et la plante ne sont pas dérangés.

L’osmonde royale vit grâce à la photosynthèse. Ses racines absorbent l’eau où se trouvent des sels minéraux. Ses feuilles captent le dioxyde de carbone. L’eau, les sels minéraux et le dioxyde de carbone lui servent à fabriquer la matière organique pour construire ses organes grâce à la lumière du soleil.

Ici, les aulnaies marécageuses.

Rare en Alsace du Nord, où sa présence est très localisée.

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